samedi 14 mars 2009



société : Article paru
le 12 mars 2009

Enfants traqués, familles éclatées

Rhône . Réseau Éducation sans frontières ne supporte plus de devoir cacher des enfants pour leur éviter l’expulsion et dénonce la « casse des familles ».

« Tous les deux jours, nous changeons de famille, explique Hadger. Nous sommes séparés de nos parents parce que la police peut venir n’importe quand nous embarquer. Nous vivons donc chez d’autres gens. C’est très dur et c’est injuste. Les enfants ne devraient pas être séparés de leurs parents. Mais j’ai moins peur que si je restais avec eux. » Hadger a quinze ans, comme Brahim, son jumeau. Ismail aura dix-huit ans dans quelques jours et Aya a sept ans. La famille Nekaa, algérienne, se cache. Le préfet du Rhône a refusé de renouveler le titre de séjour du père, titre qu’il avait obtenu pour raison de santé pendant un an et demi. Il a travaillé pendant treize mois à la mairie de Meyzieu. Les quatre enfants sont scolarisés, l’aîné dans un lycée lyonnais, les jumeaux au collège à Décines et la cadette est en CP à Meyzieu.

Autre inquiétude pour le réseau lyonnais : la situation d’Alexandre Mkrtichyan, qui a refusé d’embarquer avant-hier, de ses deux enfants nés en France et de sa femme. Arménien dont la famille a été décimée en Géorgie, l’homme avait tout à craindre d’un retour dans ce pays, d’autant que son état de santé demande un suivi spécialisé qu’il n’est pas en état de fournir, de l’avis même du médecin de la direction des Affaires sociales.

Cette vie décousue, désorientée, cette vie cassée est aussi celle de Rosani Sunil et de son fils Samir, six ans, qui se cachent depuis octobre 2008 et leur sortie du centre de rétention de Lyon. Samir a vécu des traumatismes qui ne peuvent être soignés au Sri Lanka et la préfecture du Rhône se base sur la première arrivée de Rosani en Europe pour vouloir la renvoyer en Grèce, « où tout le monde sait que le droit d’asile n’est pas reconnu et qui la renverra sans étudier la situation », expliquait, hier, en conférence de presse, les représentants de RESF, à l’hôtel de ville de Décines où les accueillait le maire socialiste, Pierre Crédoz.

Le comédien Franck Pitiot en appelait à la mobilisation de ceux qui peuvent se servir de leur notoriété, tandis que l’écrivain Pierre Péju lançait un appel à la vigilance : « Nous sommes à un tournant, disait-il. Avec ce qui se passe à Calais, avec la mise en cause de professeurs, de retraités, de gens tout simples, le gouvernement veut criminaliser la solidarité de gestes humains tout à fait naturels. Il faut un grand mouvement citoyen pour empêcher cela… »

Émilie Rive

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